Exposition du mercredi 8 avril au dimanche 10 mai 2015
Fin 2012, j’ai débuté un travail sur des personnes atteintes de maladies faciales et notamment du Noma. Chaque jour dans le monde, environ quatre cents enfants de 0 à 6 ans issus de villages reculés, sont touchés par cette maladie, éradiquée depuis longtemps en Occident, liée à la pauvreté extrême et à la malnutrition. Cette maladie se manifeste par une gingivite foudroyante qui gangrène rapidement à la fois les tissus mous et les os du visage. Le Noma a ceci d’effrayant : il foudroie ses victimes quelques heures après qu’elles l’ont contracté. Sans prise en charge antibiotique dès les premiers symptômes, il entraîne la mort dans 80 % des cas.
J’ai découvert, sur les sites des associations qui travaillent principalement en Afrique, des images en couleur des ravages du Noma qui illustrent trop rapidement l’horreur. Sur ce constat, j’ai décidé d’aller à la rencontre de malades et de rendre compte de toute l’importance que revêt une mission humanitaire pour ces personnes qui ont la possibilité d’un autre destin que celui auquel les condamne la maladie. Je témoigne également de leur courage et de l’engagement des membres du corps médical.
L’acte chirurgical est fondamental : il représente l’espoir d’un nouveau visage et d’une nouvelle vie. Début 2013, j’ai ainsi accompagné une ONG anglaise, Project Harar, qui soigne en Éthiopie des adultes et des enfants atteints de maladies ou malformations faciales telles que becs de lièvre, tumeurs, ou Noma. L’une des séries présentée ici est issue de la seconde partie de mon travail et illustre l’histoire d’Adeline, 5 ans, prise en charge par l’association Sentinelles, basée en Suisse, lors d’une mission humanitaire au Burkina-Faso. Il est question ici non pas de chirurgie esthétique mais réparatrice. Comme on me l’a confié : « Les malades sont parfois si heureux de simplement se retrouver avec quelque chose qui ressemble presque à un nez, de pouvoir desserrer les dents ou ouvrir un peu la bouche qu’ils ne sont pas toujours au rendez-vous de la prochaine mission quelques mois plus tard ». La plupart d’entre eux pourront cependant retourner ainsi dans leurs villages avec l’idée qu’enfin un autre regard sera porté sur eux.
Effacées, les personnes que je photographie le sont à plusieurs niveaux: elles sont placées au dernier rang de leur société. Comme pour la lèpre, les victimes sont souvent rejetées par leur propre communauté. Effacées, elles le sont aussi car cette horreur leur dévore littéralement le visage. Noma vient du grec numein qui signifie dévorer.
Mylène Zizzo
Mylène Zizzo est née en 1981 à La Ciotat où elle vit et travaille. Après des études en langues étrangères et en ethnologie, elle entreprend de nombreux voyages durant lesquels elle se prend d’intérêt pour le médium photographique.
Diverses formations en photojournalisme (Royal College of Art à Londres, l’École de l’information parisienne EMI-CFD) la confortent dans son choix de témoigner, par une photographie à l’esthétique épurée et frontale, des causes sanitaires ou sociales souvent passées sous silence par la plupart des médias.
Sa série «Effacés du monde», coup de cœur de l’Association Nationale des Iconographes et finaliste du Prix PixPalace, est exposée dans de nombreux festivals en France et à travers le monde en 2014. Cette même année, ce travail touche également le jury de la Bourse du Talent #58 Portrait 2014 qui la désigne comme coup de cœur.
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Exposition réalisée en partenariat avec Photographie.com
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