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Maison de la Photographie / Lille / Hauts-de-France
 

L’aigreur est mauvaise conseillère Mme Bresson. Ma lettre ouverte.

Lettre ouverte à Marie Pierre Bresson

12 février, 2022

 

Madame l’Adjointe,

En lisant la Voix du Nord du 10 février 2022, je découvre que vous auriez, dans votre réponse à une élue, fait une nouvelle fois des insinuations relatives à la Maison de la Photographie… Cela devient pour vous une habitude, puisque de manière assez obsessionnelle, à chaque fois que l’opposition prend la parole sur les sujets culturels, vous ou le Maire de Lille ne pouvez vous empêcher de faire une allusion plus ou moins rageuse à la Maison Photo.

Et cela ne date pas de cette mandature, c’est un sujet récurrent chez vous : tout le monde se souvient de la manière assez systématique où Mme le Maire ne pouvait résister à ces petites phrases assassines dont elle a le secret, pour répliquer à François Kinget du groupe “Un autre Lille”, ou avant lui, à notre regretté Loïc Lesserre.

Et bien oui ! Force est de constater que ce n’est pas uniquement le groupe Faire Respirer Lille qui critique vos actions culturelles, vos décisions arbitraires et autoritaires, mais bien les groupes d’opposition successifs, et cela depuis plusieurs mandats. Et même lors du dernier conseil de février, le groupe Lille Verte a fini lui aussi par voter contre cette subvention Lille3000, dont le montant reste scandaleux pour nombre de contribuables lillois.

Mais celà ne risquera pas de vous émouvoir, ni de vous interroger sur une éventuelle et hypothétique remise en question.

Nous le savons tous, les oppositions lilloises sont à vos yeux incompétentes, et peu importe qu’à chaque élection le score du Maire de Lille baisse si considérablement qu’il sonne comme un véritable désaveu. Un score de 66% en 2008, 52% en 2014, pour arriver péniblement à 40% en 2020, dans le contexte d’une abstention record ; une victoire dont beaucoup connaissent les coulisses, et qui restera irrémédiablement entachée d’une suspicion de fraude électorale.

Mais peu importe pour vous, seul le résultat compte !

Chacun pourra observer que dans votre grand courage, vous choisissez de ne pas répondre aux questions bien légitimes de l’opposition, lors de deux conseils municipaux successifs sur Lille 3000. Il faut dire que la chose n’est pas facile, tant vous êtes prise en défaut sur tous ces sujets culturels et en particulier celui de Lille 3000 où vous avez tant de choses à cacher.

Prise en défaut par la Chambre Régionale des Comptes et son rapport accablant, prise en défaut par la presse qui a démonté point par point vos chiffres de promotion, prise en défaut de façon systématique par les groupes d’opposition, et prise en défaut par les lillois au travers de leurs derniers votes.

Le groupe Lille Verte a relevé avec pertinence lors du dernier conseil, que quand il s’agit d’aborder un dossier culturel, pour l’Opéra par exemple, il n’y a pas de tabou, tout est transparent, la discussion est possible, mais que dès qu’il s’agit de Lille3000, tout devient opaque et nébuleux… 

Alors effectivement, cette Maison de la Photographie que vous évoquez à nouveau entre les lignes, toujours aussi maladroitement lors de cette assemblée du 4 février dernier, vous obsède et vous dérange. Elle vous dérange à un tel point que depuis 2018, vous n’avez jamais eu ni le courage ni la décence de soumettre au débat et au vote sa demande de subvention.

En Conseil Municipal début 2018, le Maire de Lille a menti à tous : elle a menti à l’association, elle a menti publiquement au conseil municipal, elle a menti aux journalistes, et surtout et c’est plus grave, elle a menti aux Lillois.  

En expliquant qu’elle avait toujours soutenu la Maison de la Photographie, que la subvention n’était pas supprimée, et bien « sanctuarisée au budget », simplement, que la ville devait « s’assurer de la santé financière de l’association », car « on ne peut pas verser une subvention à une association qui « risque de devoir fermer” quelques mois plus tard ». 

Chaque mois passant, chaque année passant, n’ont fait qu’illustrer ces mensonges et ces petites manœuvres. Le dernier rapport du Commissaire aux Comptes de l’association est sans appel : c’est bien le retrait de la subvention de la ville qui a fragilisé l’association. Ce sont bien vos attaques qui sont responsables de la fragilité de la Maison Photo. Vous devriez au moins avoir le courage de l’assumer. 

Alors en ce conseil de février 2022, vous prenez la parole en répondant à Vanessa Duhamel : “l’aigreur est mauvaise conseillère”…

C’est amusant, Mme l’Adjointe, de vous entendre dire cela…Quand tout le monde a bien le sentiment que l’aigreur est de votre coté. A chaque conseil municipal, vous transpirez l’aigreur.

Et nous pouvons le comprendre, pensez-vous, cette Maison Photo que vous aviez choisi de faire disparaître du paysage culturel lillois, et qui ne devait pas passer les premiers mois du printemps 2018, et bien, elle vous résiste ! Elle est toujours là !

Elle a organisé les Transphotographiques 2018 avec « Daho l’aime Pop » en partenariat avec la Philharmonie de Paris, la venue de Yann Arthus Bertrand à Fives , les Transphotographiques 2019 sur les mobilités en partenariat avec le Forum Vies Mobiles, l’exposition Charlotte Perriand en partenariat avec l’Académie des Beaux Arts de Paris en référence à Lille,Capitale Mondiale du Design, et un formidable hommage à la Région et aux artistes régionaux dans le cadre des Transphotographiques 2021.

Je ne pense pas qu’il y ait de l’aigreur chez Vanessa Duhamel que vous interpellez en conseil municipal. Comme tout élu, qui ne fonctionne que dans l’intérêt général avec bon sens et équité, elle et son groupe ont simplement conscience du travail réalisé par les associations dans les quartiers.

La Maison de la Photographie agit depuis 25 ans dans le quartier de Fives, comme dans toute la région Hauts-de-France : un travail réalisé dans des conditions réellement difficiles depuis 2018,  où pour de basses rancœurs politiques vous lui avez supprimé toutes les subventions et les accès aux lieux municipaux. Les élus comme les Lillois mesurent l’intérêt de l’action de tels acteurs culturels dans un quartier prioritaire, qui demeure malheureusement à la traîne dans le développement économique et culturel de notre ville et où les difficultés restent nombreuses : trafic de drogue, rodéos, manque de logements, errance et pauvreté, séparatisme…

Je pense qu’au lieu de l’aigreur,  nos élus d’opposition semblent avoir conscience de l’état d’appauvrissement d’une gestion municipale aux abois, qui choisit les petits règlements de compte politiques plutôt que de chérir et protéger les joyaux de ses quartiers, qui sont pourtant le moteur de leur attractivité et de leur développement économique. C’est ce que la Maison de la Photographie fait chaque jour dans un de ces quartiers.

Et oui, c’est bien cela le paradoxe, dans toute autre ville, les élus se féliciteraient d’avoir un tel équipement si peu coûteux en argent public, mais à Lille c’est le contraire ! Avec vous, Mme l’Adjointe, on marche sur la tête.

Mais quelque part, comment vous en vouloir ? Depuis longtemps, depuis que le Maire de Lille a déserté les idéaux de la social-démocratie, on ne nomme plus des adjoints pour leur capacité à innover, créer, accompagner, protéger les initiatives, on les nomme après s’être assuré qu’à leur tour, ils seront dociles et dévoués aux basses œuvres du Maire. Je comprends, au regard de votre évolution politique, que vous avez été finalement choisie pour cela, et vous remplissez pleinement votre mission, exactement comme l’adjointe nommée avant vous sur le mandat précédent.

Quel est le bilan des adjoints à la culture de la Ville de Lille ? Vous en conviendrez, nous ne retenons rien du bilan de Marion Gautier, et il en sera de même pour vous. C’est le triste bilan d’un règne trop long, qui pour le bien de tous aurait dû s’achever en 2020. Vous avez réussi à grappiller quelques années supplémentaires ? Et bien je le dis, pour la culture comme pour bon nombre d’autres dossiers, c’est bien regrettable, surtout pour les 60% de Lillois qui n’ont pas voté pour vous.

Et finalement, je suis convaincu que c’est parce que beaucoup dépendent de la subvention publique, municipale, départementale, régionale, et qu’ils connaissent les rétorsions politiques que la Maison Photo subit, que la plupart des associations culturelles lilloises ne se plaignent pas aujourd’hui. Et encore, je n’ai pas raconté comment, au-delà de la suppression de la subvention municipale, vous avez ensuite organisé celle des autres partenaires publics et privés, en diffamant, en menaçant, et comment vous avez encore agi en 2021 pour décrédibiliser nos réponses à des appels à projets nationaux. Ces éléments là viendront dans quelques temps…

Quoi qu’il en soit, aujourd’hui à Lille, l’expression démocratique est étouffée, et quelque part, votre abandon m’a donné la chance d’être libre de porter la voix de nombre de mes collègues qui doivent se résigner à vivre dans le silence.

Il n’y a donc pas plus d’aigreur chez moi, et je dois vous avouer que malgré l’adversité, j’éprouve beaucoup de fierté.

Finalement sans votre aide, et c’est une fierté, nous continuons de servir la photographie et la culture sur notre territoire. Le soutien, la solidarité, l’amour de la photographie restent intacts chez beaucoup de citoyens qui sont à nos côtés. 

Nous continuons à promouvoir les artistes et souvent à leur offrir une première possibilité d’exposer. Ah c’est sûr, à cause de vous, beaucoup d’artistes ne reçoivent ni l’aide financière qu’ils mériteraient, ni même la considération minimale pour leur travail sur notre territoire. J’ai été marqué par le fait que, au-delà des organisateurs des Transphotographiques, vous n’ayez même pas eu le respect de saluer le travail des artistes, qui étaient pourtant près de 200 à être exposés, dont certains issus du territoire métropolitain et même lillois.

Ce manque de respect est une honte pour notre ville, et juste le reflet de ce qu’est devenue cette majorité au fil des années.

Notre fierté d’être toujours là pour servir la Photographie, nous la partageons avec les photographes, avec les structures, avec les journalistes, avec ces quelques élus qui ont le courage malgré les pressions de nous soutenir, et qui font que depuis 25 ans, l’histoire, même contrariée de la Maison de la Photographie est une belle histoire, qui accueille le meilleur de la photographie mondiale à Lille.

Dans toutes les belles histoires, il y a les gentils et les méchants. Vous avez malheureusement choisi votre camp.

Vous l’avez compris, et j’entend que cela vous énerve, nous serons toujours là, nous étions là avant que soyez “adjointe”, et nous y serons encore quand vous n’y serez plus.

J’espère que les élus d’opposition, fidèles à ceux des mandats précédents, continuerons chaque année de vous interpeller, de vous réclamer de l’équité ; c’est le principe même de la démocratie, ne rien lâcher aux autocrates.

Alors, moi aussi, comme dans votre réponse à la question orale de votre opposition municipale sur Lille3000, je vous donne rendez-vous en mai, pour les Transphotographiques 2022.

La porte vous est grand ouverte, si jamais, rongée par le remord, vous décidiez enfin de faire ce pourquoi les Lillois vont ont élue : soutenir les artistes, les acteurs culturels, et minima, saluer leur travail.

Olivier Spillebout

Directeur

 

Références :

  1. 20 Minutes : L’asso culturelle «Lille 3000» critiquée par la Chambre des comptes
  2. Voix du Nord du 11/12/2019 : LILLE3000 : Eldorado et les chiffres, la saison lille3000 de toutes les exagérations ?
  3. Voix du Nord du 10/02/2022 : Lille : les oppositions unies, pour la première fois, contre la subvention à Lille3000

 

 

La Voix du Nord du 10 février 2021

Written by

Olivier Spillebout est le fondateur de la Maison de la Photographie qu'il à créé en 1997, et du festival international Transphotographiques, créé en 2001.