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DailyNord : Hauts-de-France : Le pacte faustien de l’Institut pour la photographie

Hauts-de-France : Le pacte faustien de l’Institut pour la photographie

Logé dans le Vieux-Lille, l’Institut pour la Photographie devrait ouvrir ses portes à la mi-2022 après de gros travaux de réhabilitation. Facture prévue de 12 millions d’euros avec des premières retombées sous le boisseau du Covid-19. Radioscopie d’un objet culturel non identifié ultra-politique curieusement absent du débat des municipales à la différence d’autres équipements. Trois ans après sa conception et deux ans après son baptême. Décryptage.

La promotion de Sam Stourdzé en grand manitou de la Villa Médicis à Rome jette un clair-obscur sur l’avenir du grand-oeuvre culturel de Xavier Bertrand imaginé voici presque quatre ans par le premier. Un temple du huitième art presque calqué sur les Rencontres d’Arles, référence dans le monde de la photographie que Stourdzé a animé. Les deux hommes se rencontrent en 2016 et le courant passe tout de suite. Bertrand est un passionné de photo et veut investir la planète culture pour lustrer son image d’homme d’une droite présumée imperméable aux arts et à ses oeuvres. Il multiplie par deux l’enveloppe culture du conseil régional et promet 110 millions sur le mandat. Sa récente tribune dans Le Point, en forme de talisman anti-catastrophe, est un plaidoyer pro domo. Contre les extrêmes ou anti-virus, la culture a trouvé un oriflamme nommé Bertrand. Un institut spécifique à haute valeur ajoutée culturelle* lui permettrait d’attacher son nom à la galaxie. Le président endosse le rôle de muse.

L’esprit de Lausanne plane sur LilleAnne Lacoste, qui était conservatrice du Musée de Lausanne prend les rênes de l’Institut et de son projet en septembre 2017. Colonisés par des experts et assesseurs qui n’ont que peu d’attaches avec les Hauts-de-France, on trouve peu de régionaux dans les premiers jurys d’oeuvres. Promis juré, la prochaine programmation fera appel à des experts et des personnalités de Dunkerque, du pôle Diaphane dans l’Oise ou du centre régional de la photo de Douchy-les-Mines.

Une première étude

Au départ, le projet de l’Institut de la Photographie était un peu différent de ce qui a été lancé aujourd’hui. Il s’agissait de développer un lieu consacré à la conservation des fonds patrimoniaux. La nouvelle école nationale supérieure de la photographie d’Arles offrait une belle opportunité, vite enterrée par Aurélie Filipetti, ministre de la culture d’un gouvernement Hollande.
En revanche, les Hauts-de-France cochent plusieurs cases. La ministre de la culture de l’époque Françoise Nyssen, première locataire de la rue de Valois du quinquennat Macron, demande à son ami Sam Stourdzé de réfléchir et de lui faire des propositions. Ce dernier préconise un établissement dit « faitier » c’est-à-dire qui collecte les fonds et conseille les photographes et les ayants droits dans leurs démarches de propriété artistique.
Parmi les villes candidates, Roubaix avait proposé un grand entrepôt textile près du Musée de la Piscine (relire). Mais vue de Paris l’ancienne capitale de la laine n’était pas assez chic ! « Et alors quoi Douchy ce n’est pas assez bien ? ça ne vaut pas le coup de se battre pour la décentralisation culturelle sur le territoire ? » s’offusquait l’écologiste Myriam Cau dans un commentaire sur ce site pour stigmatiser le Tout pour Lille qui transpire dans l’opération. L’ancienne VP au développement durable du conseil régional Nord-Pas de Calais défendait le centre régional de la photographie de Douchy-les-Mines créé il y a plus de 20 ans depuis le club photo du comité d’entreprise d’Usinor Denain et qui abrite une artothèque de plus de 8500 oeuvres. La photo avait donc des références.

Objet électoral

Mais le flash entre le patron des Rencontres d’Arles et le président des Hauts-de-France a rebattu les cartes. Le premier se fend d’un mémoire approbateur et le second embraye la mécanique du financement. La maire de Lille donne son quitus à ce qui enjolive l’image de sa ville d’art et de lettres, depuis l’année foisonnante de Lille 2004, capitale européenne de la culture. Et puis la région participe de longue date au financement de son Festival à elle, ce Lille 3000**, au rayonnement certain avec ses centaines de milliers de visiteurs, et ses millions d’euros annuels régulièrement sur la sellette de la contradiction surtout avant une bataille électorale. Mais l’entregent de Martine Aubry reste le plus fort dans les hémicycles concernés. Culture trop chère, associations locales marginalisées, rémunérations extravagantes… Qu’importe, la maire de Lille capte le projet sur sa ville. Sam Stourdzé pour la paternité, Xavier Bertrand en baptiste-financeur, Martine Aubry en marraine. Et le célèbre producteur de cinéma Marin Karmitz ami de la maire de Lille qui lui avait demandé il y a vingt ans de réfléchir à l’installation d’un cinéma d’art et d’essai aux Halles de Wazemmes un quartier populaire lillois, donne sa bénédiction en acceptant la présidence du futur chef d’oeuvre.

Pour accueillir un institut spécialisé dans la gestion des fonds patrimoniaux en plus de ses missions d’expositions et de recherche au moins 8 000 à 10 000 mètres carrés sont nécessaires. Problème, le vieil hôtel particulier de la rue de Thionville qui abritait une administration des armées puis une école enfin un service du rectorat, ne développe que 3600 mètres carrés dont moins de mille consacrés aux expositions. « Il fallait un bâtiment à ne pas acquérir et qui présente un intérêt patrimonial pour la dimension culturelle » dit-on à la région. Un profil qui ne court pas les rues. La MEL, propriétaire des lieux, cède le bijou à la région pour un euro symbolique. A charge de le réhabiliter.

La facture des travaux de rénovation en cours atteint les 12 millions d’euros payés par les Hauts-de-France. De quoi porter la surface d’exposition à 1500 mètres carrés via des extensions. « La conservation des fonds exigent des conditions hygrométriques drastiques, dans certaines pièces c’était compliqué », expliquent les services de la région. Petit à petit, le calendrier apparaît. Premier coup de pioche en février 2021, livraison en juillet 2022. C’est la phase permis de construire attendu à l’automne, qui est la plus délicate. Une signature qui dépend du plan d’urbanisme de la métropole européenne de Lille, véritable arlésienne (sic) du jeu politique local. Bientôt de nouveau sur l’établi politique après les municipales… Optimiste ? L’appel d’offres pour la maitrise d’oeuvre architecturale lancée en juillet 2018 (à hauteur de 12 millions toutes dépenses confondues) a été remporté en septembre dernier par le cabinet parisien Berger & Berger. Qui doit faire valider son avant-projet sommaire avant de poursuivre la procédure. Un vrai parcours du combattant.

Recours et bras-de-fer

Le choix de Lille a fait des mécontents. La Maison de la Photo, directement menacée par l’apparition de l’institut et qui, asphyxiée, envisage sa propre disparition d’ici peu, a déposé un recours contre le conseil régional des Hauts-de-France dont DailyNord a déjà parlé (relire). Objet de la procédure, une délibération de la commission permanente – les débats y sont plus discrets – allouant une nouvelle enveloppe de 1 600 000 euros à la mission de préfiguration « afin de poursuivre les études engagées…pour l’institut pour la photographie » – en tout les premiers budgets cumulés atteignent presque les 4 millions d’euros.
A mots couverts, certains évoquent des pressions qui seraient exercées sur les mécènes privés, particuliers et entreprises, de la Maison de la Photo appelés à son chevet et qui participent aux événements : pas question de la renflouer ou de l’aider. «On a compris que le dossier était très chaud. Dès qu’on avançait un peu, des portes se fermaient », confie l’un d’eux.

Contrat faustien

La politique lilloise a-t-elle joué dans le choix de Lille ? La Ville a coupé les subventions à l’établissement (relire). « Martine Aubry avait un compte politique à régler avec le couple Spillebout et a emmené Xavier Bertrand dans une spirale infernale contre leur Maison de la Photographie. Martine Aubry a dupé Xavier Bertrand. Elle s’est servi de lui », aquiesce un connaisseur du dossier. L’ancien ministre de Nicolas Sarkozy a signé un contrat faustien avec la maire de Lille et a su profiter de l’aubaine pour imprimer sa patte sur un grand projet. Mais qui risque de se transformer en « arlésienne » si l’affaire tourne mal, un comble.

Dans l’entourage de ce dernier, on confesse que le dossier de l’Institut est sanctuarisé. Motus surtout en cette séquence électorale. « Xavier ne veut pas prendre une balle perdue dans cette histoire », chuchote ce membre de la majorité. Le député du Rassemblement national Sébastien Chenu l’a déjà escagassé en commission permanente sur le même sujet (relire).
Pour Xavier Bertrand, en campagne pour sa réélection à la tête des Hauts-de-France (avec la France dans le viseur), et qui a bien compris l’importance de la planète culture, l’avatar de l’institut peut se muer en piège électoral.

Pour comprendre, il faut rappeler que le forfait de Pierre de Saintignon et sa liste de gauche aux régionales de 2015 pour faire échec à Marine Le Pen, a jeté le vainqueur Xavier Bertrand dans les bras de Martine Aubry, mentor du premier. Une dette inextinguible entre eux et une étrange alliance (relire notre analyse). L’institut pour la photographie en guise de solde de tout compte ? C’est la question que se posent de nombreux observateurs. Curieusement discrète sur le sujet depuis la fameuse annonce fondatrice d’Arles, la maire de Lille semble éluder la question. Le document officiel de sa campagne ne fait pas mention du programme, certes piloté par les Hauts-de-France. Tout juste relève-t-on : “soutien à l’accueil des plus grandes oeuvres…photographiques” (p.35). Contactée sur le sujet, la mairie de Lille précise : ” Le projet a été initié par la région des Hauts-de-France. La ville a été invitée par l’association ( NDLR : de l’Institut) à rejoindre le conseil d’administration. La ville ne verse aucune subvention et n’intervient pas dans les activités. Le moment venu, la ville instruira le permis de construire“. Fermez le ban.

Et le Trafalgar politique rôde. Martine Aubry en triangulaire inédite, Damien Castelain, patron de la MEL, qui remet son titre en jeu…de quoi dénouer le pacte des fauves. Si les équilibres politiques changent en juillet prochain, le bel objet de Xavier Bertrand se retrouve probablement sur la sellette. « L’Institut sera sauvé quoiqu’il en coûte. Martine Aubry et Xavier Bertrand ne laisseront pas mourir leur enfant. Il y a un enjeu culturel pour Xavier Bertrand et un enjeu politique et électoral pour Martine Aubry », décrypte cet élu de la métropole lilloise. Et il faudra compter avec la crise économique qui se profile même si les grandes collectivités et autres inter-communalités, plus dépendantes des ressources liées à la croissance que les communes, doivent réduire la voilure et évaluer de nouveaux arbitrages.

L’année dernière, les premières expositions du vernissage inaugural – copieusement promues en pubs dans la presse régionale – ont attiré 1 600 curieux suivis de 24 809 visiteurs qui ont visité les suivantes. De quoi amorcer la pompe. Le nouveau contexte sanitaire imposé aux événements qui attirent du public bouscule la donne des événements culturels et artistiques. Une nouvelle série d’expositions devait se tenir au printemps et l’épidémie ajourne la programmation, conçue comme une sorte de teasing à l’adresse du public. Une nouvelle programmation est fixée pour cet automne. « Je souhaite que le projet soit une réalité dans moins d’un an » avait précisé Xavier Bertrand au journal des arts du 10 juillet 2017. Le rythme de croisière se fait attendre.

* Les missions de l’institut pour la photographie sont au nombre de quatre : diffusion, soutien à la recherche et à la création dans les Hauts-de-France, pédagogie et lecture critique de l’image, conservation des fonds patrimoniaux et valorisation des archives.

 

A la loupe

Sam Stourdzé est un démiurge de l’art photographique qui a imprimé sa patte un peu partout. Il a ses réseaux et ses équipes. En juillet 2018, le rejeton est porté sur les fonts baptismaux à Arles en présence d’une certaine Martine Aubry, maire socialiste de Lille. Le secret avait été bien gardé. A Arles, celui que l’on présente comme un Pygmalion de la profession a déployé ses ailes. Lui et son prédécesseur François Hebel ont fait des Rencontres un must de la planète photo. La petite entreprise est devenue grande. A tout seigneur tout honneur (il n’a pas répondu à notre sollicitation). Un seigneur qui a toujours refusé de dévoiler sa rémunération au pays des arlésiennes comme le signale Le Monde (29 juin 2018) mais dans la ville, des montants circulent, un salaire de ministre. En contrepoint, l’auteur s’étonnait déjà que l’on puisse ne pas rémunérer les photographes malgré une légère avancée en forme d’aumône et surtout en comparaison d’autres festivals plus généreux. « Si Arles n’y arrive pas ce n’est pas qu’une question de moyens, c’est que son modèle pose problème (NDLR : après longue pression du ministère pour rémunérer l’artiste photographe, la production des oeuvres est payée par le festival qui la rétrocède ensuite à l’artiste, sorte de paiement en nature), au point que beaucoup se demandent où vont les 7 millions d’euros de budget » conclut-il. Bref, des pratiques qui rendent perplexe la communauté régionale du huitième art qui s’est émue il y a un an (relire) quand l’institut lillois a été porté sur les fonts baptismaux.

Solution de rechange ?

Depuis plusieurs années, Arles abrite aussi la LUMA, la grande fondation du groupe pharmaceutique suisse Hoffmann-Roche. La ville est belle et la milliardaire Maja Hoffmann, héritière du trust, ne s’y est pas trompée en édifiant une grande tour contemporaine pour signer la fondation, prélude à une sorte de Bilbao en Arles. En rachetant les onze hectares des anciens Ateliers SNCF de la commune et en programmant 150 millions d’euros, la fondation imprime un effet à la ville. Et contrôle beaucoup de lieux et surfaces dédiées aux expositions. Une emprise qui fait jaser en cette période électorale (l’ancien patron de France Télévision Patrick de Carolis devrait tirer son épingle du jeu et succéder au maire communiste qui ne remet pas son mandat sur la table et a ouvert les portes de la Cité à la milliardaire).
Le projet lillois a-t-il représenté une solution de rechange ? “C’est Sam qui lui a soufflé l’idée. Quand ils ont annoncé le projet lillois, tout le monde a pensé : c’est la fin des Rencontres à Arles”, explique ce spécialiste local qui veut conserver l’anonymat. Le reproche d’”Arles-en-Nord” était dans l’oeuf. Et le dispatching des missions entre Arles et Lille ne saute pas aux yeux. « Sur les neuf expositions déjà réalisées, il n’y a qu’une seule co-production avec Arles », se défend Anne Lacoste, la directrice de l’Institut.
En 2011, les confrères suisses de La Liberté avaient pointé une exposition sur Fellini au musée de l’Elysée à Lausanne (canton de Vaud) dont Sam Stourdzé était le directeur avant de rejoindre Arles trois ans plus tard. Une opération coproduite par une société détenue par lui-même. Des zones d’ombre qui soulevaient la question du conflit d’intérêt que l’intéressé a réfuté catégoriquement. Selon lui tout s’est fait dans la transparence et la légalité. Dont acte. A Lille, l’institut pour la photographie relaye encore sur son site les activités d’une société, Whipplay, qui fut fondée et dirigée par Sam Stourdzé il y a dix ans et qui fait partie du volet grand public et participatif…

 

Une sorte de nouveau Lille 3000 ?

Une sorte de « Lille 3000 de la photo », entend-on parfois à propos de l’Institut. La métaphore est éloquente. C’est la figure de Didier Fusiller qui surgit, le grand ordonnateur du Festival lillois, cher à Martine Aubry, plusieurs fois cloué au pilori pour ses émoluments y compris par la chambre régionale des comptes (relire nos révélations), ce qui pimentera les débats au conseil municipal de Lille (relire).
Des reproches qui ressemblent à ceux adressés à l’institut pour la photo. Chacun son caillou dans l’escarpin. Avec le temps, on commence à murmurer. Et ce n’est pas la figure de Véronique Terrier-Hermann qui apaise la houle. Cette brillante enseignante-chercheur, docteure en histoire de l’art contemporain n’est autre que la propre épouse de Sam Stourdzé. C’est elle qui prend la direction du programme de soutien à la recherche et à la création de l’Institut. En clair la haute main sur la dimension artistique et les réseaux culturels. Selon nos informations, son poste est « à 15 % » avec la rémunération en fonction. Cela suffira-t-il à éloigner le spectre de l’entre soi ? Anecdote, Françoise Nyssen est aussi la généreuse éditrice d’Acte Sud, autre institution arlésienne, qui compte dans ses collections les ouvrages de Véronique Terrier-Hermann.

 

Saintignon et Percheron avaient flashé !

C’est le premier adjoint à la mairie de Lille, Pierre de Saintignon, lieutenant disparu de Martine Aubry, et ex-vice-président du conseil régional, qui s’exclamait en février 2016 à l’occasion d’un vernissage Julian Lennon : «  Une maison accueillante vous le voyez, celle qui présente des expositions nationales et internationales, de renom. Et qui sont très visitées. Celle qui donne la chance aux artistes, aux jeunes artistes, et celle qui est un instrument de proximité vers la population car nous sommes ici dans un quartier très populaire, et le dialogue qui est établi entre la Maison de la photo et le quartier, les habitants de ce quartier est pour nous une question extrêmement importante, donc je voulais saluer très chaleureusement pour tout cela, Olivier Spillebout, qui est le patron de la Maison de la Photo ». Une vraie déclaration d’amour de la part de celui qui a tenté vainement de raccommoder les deux parties quand Martine Aubry snobait les expositions !

C’était deux ans avant le clash entre la maire de Lille et son ex-collaboratrice qui avait quitté le service du cabinet quelques années auparavant, presque un affront pour une Martine Aubry. La Maison de la Photo, presque à sec de subventions, sert de punching-ball dans la bataille pour le beffroi qui se joue entre Martine Aubry, l’écologiste Stéphane Baly et Violette Spillebout, candidate LREM. Il y a quelques années, le prédécesseur de Xavier Bertrand, le socialiste Daniel Percheron ne tarissait pas d’éloges sur l’événement-phare de la Maison de la Photographie, les Transphotographiques qui rayonnait depuis Lille sur plusieurs dizaines de villes du Nord-Pas de Calais en 24 ans d’activité et avec des moyens bien moindres. «  Le festival qui tutoie Arles », s’enflammait-il avec le lyrisme qu’on lui connaissait. Il avait dit Arles ?