Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Maison de la Photographie / Lille / Hauts-de-France
 

Ciel Variable : Les Rencontres d’Arles : Beau temps chaud et sec avec possibilités de précipitations !

Géopolitique de la culture photographique institutionnelle française à l’été 2018

CIEL VARIABLE Janvier 2019  par Bruno Chalifour

Le projet de l’Institut pour la Photographie des Hauts-de-France

Côté ville d’Arles et Rencontres, le projet d’Arlescentre européen de l’image, avec la création d’unlieu pour les Rencontres (aux normes enfin muséales)et un hébergement du patrimoine photographiquefrançais, semble prendre l’eau à grande vitesse (d’autant plus avec le changement radical de la composition politique du conseil régional PACA, catastrophique pour la culture et surtout pour Arles). On acru voir la frustration du directeur des Rencontres,Sam Stourdzé, s’exprimer indirectement lors de laconférence de presse confirmant la création d’unInstitut pour la Photographie dans les Hauts-de-France à Lille (annoncé lors des Rencontres 2017).Il a déjà son site internet: https://www.institut-photo.com. Le bureau courant est constitué de MarinKarmitz, président, de Sam Stourdzé (reconversionfuture ?) et du président de la région des Hauts-de-France, Xavier Bertrand. Ce dernier s’est chargé dela présentation d’un projet ambitieux d’envergureinternationale, hébergé dans un ancien lycée aucentre de Lille, avec lieu d’exposition, salle de conférence, enseignement et hébergement possible dupatrimoine photographique français. Sa premièreconférence a eu lieu les 17, 18 et 19 octobre sur lesthèmes de la conservation et du patrimoine photographiques.

Qui veut la peau de la Maison de la Photographie de Lille ?
Ce projet sonne tout bonnement le glas du projet arlésien, une triste réalité pour les Rencontres et bien sûr pour Arles et Hervé Schiavetti, son maire, qui avaient beaucoup misé et dépensé de l’énergie pour le futur culturel et économique de la ville. Il sonne  aussi un autre glas, celui de la Maison de la Photo de Lille. L’Institut pour la Photographie est un peu le bébé de Xavier Bertrand (du parti Les Républicains jusqu’à sa démission en 2017 à cause de la dérive à l’extrême droite de Laurent Wauquiez), élu président de région grâce à une coalition droite-gauche pour faire front à Marine Le Pen (en tête des suffrages au premier tour avec 40 % des voix). Ce petit détour politique est nécessaire pour essayer de comprendre le silence total de l’ex-ministre et actuelle maire socialiste de Lille, Martine Aubry, aussi présente à Arles, lorsque je lui ai demandé de justifier le retrait de la subvention annuelle (130 000 € prévus en 2018, en baisse par rapport aux 200 000 € du début des années 2000) à la Maison de la Photo, une subvention que sa municipalité avait accordée jusque-là à cette structure associative existant depuis 1997, L’atelier de la Photo.

Implantée dans un quartier populaire de la banlieue de Lille (18, rue Frémy, à Fives), avec 20 ans d’existence, cette association a son lieu d’exposition  2003 (La Maison de la Photo), ainsi qu’unepolitique éducative et d’exposition (George Rousse,William Klein, Frank Horvat, Willy Ronis, TendanceFloue, Helmut Newton…), un festival annuel d’envergure nationale, Les Transphotographiques, et unecollaboration avec La Maison Européenne de la photographie et son directeur Jean-Luc Monterosso. Enavril, la municipalité a accordé une partie de sa subvention, soit 30000 €, au seul festival Les Transphotographiques, mais elle a en même temps refusél’accès du festival à un lieu que celui-ci occupaitd’habitude, le Tri Postal.

Dans un communiqué de presse daté du 18 octobre, le directeur de la Maison de la Photographie,Olivier Spillebout déplore le peu de concertation etle manque de transparence qui semblent caractériser le projet depuis un an. Il s’étonne du grand écartréalisé avec les Rencontres d’Arles alors que de nombreuses autres structures nationales ne sont pasappelées à la table de réflexion, et du fait que l’espace d’exposition pour un projet coûteux sera à peine supérieur à celui qui existe à la Maison de la Photographie. Il fait remarquer que Lille, avec la Maisonde la Photographie, a déjà une structure, un espace,une action d’éducation et d’exposition qu’il seraitsans doute moins coûteux d’améliorer, alors qued’autres villes de la région pourraient bénéficier del’implantation de l’Institut, certaines ayant déjà unpassé lié à la photographie. Sa dernière question:qu’en sera-t-il de l’éducation populaire et des artisteslocaux dans le nouvel Institut ?

Pour l’instant, il semble que la Maison de la Photographie, comme Voies Off à Arles, va devoir revoir les conditions de son existence tout en regardant le nouvel Institut pour la Photographie se développer sur ses cendres. Quelques nuages donc en perspective, la fin de structures associatives de terrain en faveur de regroupements institutionnalisés ? Il semble que les principes de l’économie de marché prennent le pas sur la concertation et la participation, que le pouvoir, même démocratiquement élu, n’est pas facile à partager… dans un ciel français qui s’affirme de plus en plus photographique, y compris dans le plat pays qui est le leur !