Voix du Nord : La photographie en question
Voilà bien longtemps qu’une telle foule ne s’était pas pressée à un vernissage : la semaine dernière, au Palais des beaux-arts de Lille, le festival des Transphotographiques inaugurait sa troisième édition avec l’exposition Peter Lindbergh. Un succès qui récompense le travail mené, depuis 2001, par le fondateur de ce rendez-vous, Olivier Spillebout, et toute son équipe. D’édition en édition, la programmation des Transphotographiques s’enrichit par le nombre d’expositions proposées (60 cette année), les artistes présentés (80) et les lieux impliqués (40) dans la métropole lilloise, mais aussi à Valenciennes, Nœux-les-Mines, Arras et Calais, sans oublier Tournai et Courtrai de l’autre côté de la frontière. Le festival dure un mois, se veut grand public, ouvert à toutes les pratiques et organise des conférences, des stages, des projections de films ainsi qu’une bourse d’aide à la création. Il possède même son « Off ». Le comparer aux Rencontres internationales de photographie d’Arles serait néanmoins manquer de prudence et de discernement. Si on se félicite de la rétrospective Noguès, de l’exposition Kollar, de la présentation du fonds Harry Lunn, des grands formats de Banier ou encore des photographies troublantes d’Ascolini, si on découvre avec étonnement des lieux d’exposition insolites comme la crypte de la cathédrale de la Treille, on se pose aussi quelques questions. Pour quelles raisons, manque-t-il autant de cartels et les informations nécessaires et précieuses qu’ils offrent aux visiteurs, même les plus avertis ? Pourquoi les accrochages sont-ils aussi denses — faut-il absolument en avoir plein la vue ? – et les éclairages parfois aussi maladroits desservant ce qu’ils sont censés mettre en valeur ? En ce qui concerne les choix esthétiques, affaire de subjectivité, chacun est libre de se faire sa propre opinion… L’autre enseignement à tirer, sans doute l’un des plus importants d’ailleurs, est que ce festival souligne un véritable manque dans le paysage culturel lillois. En effet, à part quelques initiatives isolées, ponctuelles et par-fois décevantes, il n’existe toujours aucun lieu permanent dédié exclusive-ment à la photographie, à l’exception de la galerie Nadar à Tourcoing. Pour-tant plus personne ne doute aujourd’hui du rôle déterminant que joue l’image, même fixe, dans notre société. Alors pour quelles véritables raisons ? Une question qui résonne d’autant plus, juste avant la grand messe de 2004.
François Lecocq
Voix du Nord du 23 mai 2003
Vasco Ascolini est exposé au palais Rihour à Lille.