À la Maison de la photographie, les « American Girls » d’Ilona Szwarc
Elles ont toutes un regard absent, des yeux fixes, graves, tristes peut-être,
encore que certaines semblent comme défier fièrement l’objectif de la photographe qui les fixe, donc le spectateur qui scrute la photo. L’exposition American Girls d’Ilona Szwarc que la Maison de la photographie de Lille présente (jusqu’au 1er juin), pour relativement confidentielle – une vingtaine de photos -, mérite qu’on s’y arrête. Cette jeune photographe trentenaire d’origine polonaise, installée à New York depuis 2008, a déjà un beau parcours. Photographe de plateau, elle a travaillé pour la publicité, le cinéma, courts et longs métrages, côtoyé des réalisateurs comme Roman Polanski, Andrzej Wajda, Jonathan Glazer. Mais c’est pour un travail de portraits, proche de ceux présentés à Lille, qu’elle a reçu il y a quelques mois un prix du World Press.
Double parfait
Elles s’appellent Gillan, Sophie, Maya et Leela. Ces « american girls » qu’elle saisit dans leur univers posent avec leur poupée, la plupart du temps habillée comme elle, comme si l’une serait la représentation de l’autre, son double parfait – hormis la taille. Ilona Szwarc les saisit à New York et à Boston, au coeur des villes comme au fin fond de la ruralité américaine. Pour la photographe, la place de ce jouet qu’est la poupée « pose d’importantes questions » quant à l’image et au statut de ces fillettes, futures femmes américaines, dans ce qu’elles deviendront. À moins que ce soit aussi l’image d’une enfance en train de passer. Où la photographie pose des questions que les mots ne suffiront sans doute pas à résoudre.
Jean-Marie Duhamel