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Maison de la Photographie / Lille / Hauts-de-France
 

Patrycja Orzechowska : Untitled

Exposition du 13 mai au 12 juillet 2009

 

Le cycle Untitled de Patrycja Orzechowska est une série de citations de l’univers cinématographique. Aucun film en particulier n’est évoqué – il est plutôt fait allusion à des univers flous et indistincts.

La série est composée d’impressions digitales et d’un diaporama. Il s’agit d’images de couples tirés de films, affranchis de leurs histoires. L’existence de ces images hors du film et de la réalité, au-delà de  l’histoire et du lieu constituant leur identité propre, efface le contexte original et, plus important, change le sens de l’image elle-même. Le flou des photographies ne permet pas de distinguer les détails des scènes choisies, évitant ainsi l’abondance de narration visuelle et attirant l’attention vers une ambiguïté nouvellement créée. Les images que nous discernons en fin de compte sont des silhouettes ou des ombres auxquelles le spectateur donne les sens et interprétations crées par son esprit. Selon le constat de l’artiste, les souvenirs présents dans notre esprit sont pareillement partiellement effacés mais ne cessent jamais d’exister. Le slideshow et son autofocus instable, comme constamment à la recherche de l’image idéale, évite également de fixer l’image – activant l’imagination du spectateur.

Afin de discerner quelque chose, nous devons « capturer » les images à la limite du visible et de l’invisible et forcer l’esprit à recréer constamment le premier coup d’œil. L’incertitude des images rend moins réelle l’existence des silhouettes représentées. Le travail est constamment en mouvement et l’ultime capture n’est jamais réalisée. Observer ces photographies amènent à se demander « qu’ai-je vu ou qui ? », « Que s’est il passé ? », « Qu’est ce qu’il/elle fait », « Est-ce que ce que je vois est réellement ce que je pense voir »

Les films sélectionnés choisis par l’artiste racontent la complexité de la vie et les scènes coupées focalisent notre attention sur l’insatisfaction –  le manque de compréhension, la trahison et le rejet. L’utilisation de modèles culturels déjà existants –  popularisés par le média cinématographique – confère à ce projet un aspect critique contre la culture postmoderne actuelle dans laquelle le nombre excessif d’images et leur éternelle accumulation et superposition mène à la perte d’authenticité et à l’affaiblissement de l’information véhiculée par ces images. D’un autre coté, le choix du procédé et de la présentation révèle le modèle de perception exercé et témoigne de notre impuissance face à l’ambiguïté résultant d’une scène unique.

L’effet de disparition et de réapparition des images, évitant la mise au point permet uniquement une assimilation brève de scènes floues et non cadrées – comme si elles étaient vues de loin – semblant confirmer le point de vue critique des thèses de Paul Virilio sur la vitesse et la disparition. Le cycle  Untilted s’avère n’être pas seulement un test, mais aussi un piège dans lequel nous tombons, et la culture visuelle également.

Le jeu complexe entre visible et invisible entrepris par l’artiste est également une tentative ayant pour but de « purifier la vue ». L’explication du mécanisme de la vision dans le contexte de nos habitudes culturelles révèle aussi la manière dont nous fonctionnons. « L’histoire de la culture est un champ où certains accords entre vision et pensée prennent place, et au sein desquels la vision sert la pensée » et, pour poursuivre plus loin la thèse d’Iwona Lorenc, dans le contexte de Maurice Merleau-Ponty, qui montre que par le biais de ces accords, la vision perd son autonomie de percevoir les choses telles qu’elles sont avant d’être conceptualisées. La série Untitled tente d’atteindre ce que Merleau-Ponty définit de la manière suivante : « Ce qui révèle un ordre de vision spécifique, indépendant du concept et perceptif, ce sont les logos muets (non conceptualisés)».

Małgorzata Jankowska 2009

 

Exposition dans le cadre des Transphotographiques 2009

 

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