Se souvenir, discuter, avancer…
A Lille, le photographe Cédric Dhalluin consacre une exposition à la fermeture de Metaleurop
Depuis le 15 mai et jusqu’au 15 juin, dans le cadre des Transphotographiques 2004, la Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Lille abrite une exposition consacrée à Metaleurop Nord, fruit du travail accompli par Cédric Dhalluin. Comme les Marcel et son Orchestre, à l’origine du gigantesque concert de solidarité donné il y a un an, au stade couvert de Liévin, en faveur des familles de fondeurs. Comme l’écrivain Frédéric H. Fajardie, auteur de « Paroles Ouvrières », un bouquin écrit avec les Metaleurop et dont les bénéfices de la vente auront été reversés jusqu’au dernier centime (d’euro) aux ex-salariés. Comme John-Paul Le-pers (pour Canal +), mais aussi Jean-Michel Meurice et Christian Dauriac (pour Arte), venus d’abord accomplir leur mission de journalistes, pour finalement livrer deux splendides documentaires sur un conflit ayant squatté la Une des journaux durant le 1- semestre 2003. Comme eux et comme tant d’autres, Cédric Dhalluin, photographe, a été touché par l’histoire des Metaleurop, ces 830 bonshommes qu’une petite poignée d’actionnaires aura décidé, du jour au lendemain, de sacrifier sur l’autel du rendement boursier…
Tout commence en octobre 2002…
Et Cédric Dhalluin d’expliquer pourquoi il a choisi de travailler sur ce sujet : « Plus grande friche industrielle de France, de par sa taille et sa toxicité, Metaleurop Nord, en activité pendant à d’un siècle, apportait a la fois manne et poison aux communes alentours. Aujourd’hui, les retombées économiques se sont évaporées avec les responsables. Restent des hectares pollués et une profonde amertume chez les ex-salariés et les riverains. Mon reportage débute en octobre 2002. Je rencontre les habitants voisins de l’usine et découvre alors le tabou des problèmes de santé liés au plomb. Dans une région où, par tradition, le travail pénible est source de fierté, il est difficile d’ad-mettre que son métier puisse avoir des conséquences assassines. Les langues se délient avec la fermeture de l’usine, où l’on commence à mesurer l’ampleur du sinistre : social, écologique, sanitaire, économique (…) En novembre 2003, je retourne sur le site. La lutte sociale est terminée depuis la liquidation judiciaire. La vente aux enchères à déjà eu lieu et les ferrailleurs viennent se servir à la hauteur de leurs achats, parfois plus. Quatre à cinq ouvriers de maintenance, indispensables à l’entretien de l’usine, sont présents sur les lieux. Je découvre alors une carcasse vide. Vide d’activité, vide de sens. Absurdité d’une fermeture programmée au profit de l’enrichissement des actionnaires, logique libérale respectée. »
Acteurs et témoins à nouveau réunis
Son travail a retenu l’attention des organisateurs des Transphotographiques de Lille, une manifestation inscrite au programme de « Lille 2004, capitale européenne de la culture » et mettant aussi bien en exergue, à travers des dizaines d’expositions réparties dans tout le Nord/Pas-de-Calais, la photo dite de « témoignage » que celle d’art. Avec quelques pointures au menu : Sebastiao Salgado, Bettina Rheims, Orlan, Georges Rousse, William Klein…
Le vernissage de l’exposition de Cédric Dhalluin, qui intègre le programme « off » de ce festival, aura lieu le mardi 1 » juin, à 18 heures, à la Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales de Lille. Il sera précédé, de 14 heures à 16 heures, par une conférence donnée par des enseignants de l’université (profs de droit, d’économie, de science politique), qui expo-seront le regard porté par leur discipline sur l’exemple Metaleurop. Puis, de 16 heu-res à 18 heures, des tables rondes rassembleront les té-moins locaux du drame Metaleurop : ouvriers, syndicalistes, associations, journalistes ou écrivains, qui tenteront de répondre aux interrogations du public.
L’exposition sera visible jus-qu’au 15 juin, du lundi au vendredi, de 8 heures à 19 heures, et le samedi, de 8 heures à 12 heures. Renseignements au © 03 20 90 74 00.